24mai.
Eh bien comme prévu la journée d’aujourd’hui ne ressemble pas à celle d’hier (la mer n’était pas furieuse, il n’y avait pas assez de vent, elle était désordonnée, très désordonnée !). Le jour s’est levé sur un ciel bleu avec des cumulus (des mignons gentils, pas des gros congestus). Temps superbe toute la journée. Un vrai temps pour faire découvrir la voile à sa fiancée ! J’espérais faire pour la première fois depuis le départ une journée supérieure à 100 Nq mais je crois que ça va être difficile. Car le vent m’a lâché vers 14h. On fait un petit 3.5nds, j’ai toujours le courant contre-équatorial dans le nez mais un peu plus faible. Et voilà maintenant que le vent refuse et que je remonte dans le nord. Soyons patients.
Normalement demain et surtout samedi je devrais avoir plus de vent. En tous cas je ne prends pas d’avance sur le planning.
Avec ce beau temps bricolage rangement : j’ai remis en place la poupée du barbotin (avec écrou, contre-écrou et frein filet, si avec cela ça s’en va…), fais des protections anti-ragages pour l’écoute de génois sur le tangon, fini le nouveau câblage du frigo, évacué d’autres fils inutiles ou partiellement débranchés, mis en place le système de récupération d’eau de pluie sur le bimini.
Je voulais me faire de la cuisine ce soir mais il est trop tard, je n’aurai pas le temps.
25 mai.
Hier farniente au soleil, petit vent gentillet, aujourd’hui je suis passé en mode survie, GV 2 ris et j’ai même sorti le foc 1 qui n’avait pas servi depuis le North West Passage.
Les Grib annonçaient 12 nds, j’en ai 25. Demain et dimanche ça va encore forcir. En fait si Grib et MTO (qui annnonce aussi 5 à 15 nds !) ne se gourrent pas complétement j’en ai peu près jusqu’à mardi.
Pour le moment j’ai 23/24 nds, avec le foc je suis un peu sous-toilé mais le bateau passe bien et ne souffre pas. Comme la nuit ne va pas tarder à tomber je pense rester comme çà.
Donc activité bord plus réduite aujourd’hui. Juste quelques mails aux copains et d’autres techniques.
Pour déjeuner j’ai eu l’idée de mettre une boite de moules dans un restant de riz pilaf. Eh bien c’était une très bonne idée, la prochaine fois j’essaierai avec des clams.
Les courses de frais au Mercado de Abastos n’étaient par contre elles pas une bonne idée. J’ai beaucoup jeté.Même les citrons jaunes bio de Quentin ne tiennent pas. J’en ai déjà jeté trois, néammoins je ne risque pas le scorbut!
Et je n’ai toujours pas franchi le 04N. A un moment je n’en n’étais plus qu’à 1000 m mais non. Ca m’a aussi permis d’éviter un haut-fond (3,2m) histoire de ne pas faire le coup de Vestas ( le VOR 60 qui s’est foutu au plein sur un récif dans l’océan Indien parce que le navigateur n’avait pas zoomé sur sa carte et n’avait pas vu le récif ! Google Vestas). Le vent a refusé et je suis actuellement 4 Nq nord du 04°N.
27 mai.
Eh bien voilà, la MTO s’améliore.
Hier ce n’était pas dantesque : quand je dis “mode survie” c’est que les conditions sont telles que je ne fais rien d’autre. Demande à Anne: 19 jours dans l’ATL elle sait ce que c’est.
D’ailleurs cela va beaucoup mieux aujourd’hui. Le vent est conforme aux prévisions : 17 nds annoncés, j’ai 17 nds. Hier j’avais 25 nds pour 12 annoncés. En plus le vent est beaucoup plus stable. Hier et cette nuit j’ai beaucoup dû manoeuvrer, depuis ce matin stable. Bon ça reste : GV un ris, génois un ris et liston presque dans l’eau, mais la mer est plus calme les mouvements sont plus agréables. Autres bonnes nouvelles : ça y est le vent est passé sud, et j’ai franchi le 04°N.
Ce matin j’ai fait du pain. J’étais un peu inquiet à cause des mouvements du bateau. Alors bien sûr ça n’a pas été facile mais je suis très content du résultat. Deux beaux pains de 250g qui ont rempli les moules, ne sont pas redescendus et une croûte bien dorée : 55′ de cuisson. Reste à reproduire…
Avec un peu de chance (comprendre si les prévisions sont exactes), demain je vais pouvoir mettre un peu de mou dans les écoutes. Et retravailler un peu à bord.
PS : je me suis éloigné de la station de Panama, maintenant c’est vers 17h le bon créneau.
28 mai.
Nous sommes toujours sous génois 1T, GV 1R. Le bateau gîte mais ne tape pas. J’ai l’impression de bien marcher mais c’est moins évident quand je regarde le GPS. Peut-être encore sous l’influence de ce foutu contre-courant équatorial ? Je vais descendre jusqu’à 03°N. Après je ne voudrais plus descendre car si je passe trop près des Galapagos je vais me faire scotcher dans des calmes.
Bilan de la première semaine : 784 Nq sur l’eau (soit 4.7 Nd) pour 700 Nq utiles soit (4.2 Nd). Pas terrible comme moyenne. Mais je pense que ça devrait s’améliorer. Il le faudrait si je veux être là pour l’arrivée de Cathy à Hiva Hoa.
Aujourd’hui j’ai vu (vu façon de parler), vu sur l’AIS uniquement un porte-conteneurs. Le Fedora qui va à Auckland. Le premier depuis cinq jours.
D’ailleurs c’est assez désert dans le coin. Peu d’oiseaux, peu de dauphins. Cela fait trois jours que je ne pêche pas mais avant je n’ai rien pris.
Demain cela ne devrait pas être très différent, avec un vent qui refuse sans doute.
Je mange mon pain noir. Le blanc ne devrait pas tarder à arriver.
29 mai. Sula Sula!
Une journée dans la vie d’un fou à pieds rouges : oui parce que chez les fous ce qui compte c’est la couleur des pieds. Mes cousins aux pieds bleus (Sula Nebouxii) jouent les vedettes. Alors qu’ils ont un bec d’une couleur tout à fait banale. Moi j’ai le bec bleu comme leurs pieds et mes pieds sont rouge vif, c’est quand même plus original. Et donc je suis un fou à pieds rouges (Sula Sula).
“- 06h30 : lever du jour. Tiens un bateau. J’irais bien me reposer un peu dessus.
– 06h35 : zut je ne suis pas le seul à l’avoir repéré, il va falloir jouer des coudes. Il y a quatre places sur le balcon, j’ai réussi à avoir mon ticket.
– 06h40 – 10h30 : Toilette. Lissage de plumes devant, derrière, à droite, à gauche. Tout en surveillant un peu les abords parce y’en a qui veulent me piquer ma place mais il y a aussi à l’arrière du bateau quelque chose qui bouge mais qui n’a pas l’air hostile. Tiens il s’approche. Même pas peur. Je savais qu’il ne fallait pas bouger, il est reparti à l’arrière.
– 10h 30 – 12h00 : je ferais bien un petit sieston. Mais pas moyen dès que je mets la tête sous l’aile, on veut me piquer ma place. Donc je regarde le paysage.
– 12h00 – 14h00. Enfin un peu peinard pour roupiller. C’est que je suis jeune moi, j’ai tout juste un an j’ai besoin de dormir.
– 14h00 – 16h00 : re-lissage de plume. Par habitude, je n’ai pas volé depuis ce matin.
– 16h30 : c’est l’heure où le gars à l’arrière va donner des nouvelles. Même pas faim. On est bien là, décontracté du colon (eh oui, il faudra nettoyer derrière !) posé sur le balcon…”
Ce fut donc une journée en compagnie des Red Footed Boobies.
Grand beau, vent faible (peut-être suis-je passé trop près des Galapagos? Mais d’un autre côté j’ai maintenant un courant favorable qui me pousse).
Et j’ai enfin pêché un thon jaune, pas très gros, il me fera deux ou trois repas. Ce soir Sashimi, demain midi ceviche (Mais je n’ai plus de carottes !).
Et l’activité principale de la journée aura été la pose définitive du contrôleur de batteries avec l’altuglass apporté à Panama. Cinq heures de boulot.
Hier soir (il y avait encore du vent) l’une des deux ferrures qui tient le hale-bas de bôme a lâché. Cela m’est arrivé plusieurs fois. En 2013 j’avais doublé avec une deuxième ferrure et depuis j’étais tranquille. Peut-être ais-je trop étarqué le hâle-bas ?
1er juin.
La matinée a commencé tôt puisque j’ai passé la ligne à 04h 05′ 35″. Je l’ai passée en 100°00.00 W (petite coquetterie !). J’ai pris photos et copies d’écran pour le blog. Et puis comme changer d’hémisphère ne suffisait pas, j’ai changé d’heure aussi. Nous avons maintenant neuf heures de décalage.
J’ai aussi eu mon pot d’accueil en changeant d’hémisphère. Le vent est soudain monté d’un cran jusqu’à F7. Je ne voulais pas réduire tout de suite sinon pas de copies d’écran. Donc ça pulsait pas mal (8.6 nd sur l’eau). Ca a bien soufflé jusqu’en fin de matinée et maintenant c’est très calme : 13 nds.
Le temps est toujours gris. Gris et pas très chaud. Un teeshirt en fin d’après-midi est le bienvenu. Cela nous change de Panama et du transit San Blas Panama. De temps en temps un rayon de soleil mais jamais bien longtemps. Les Grib n’annoncent malheureusement pas de pluie. Dommage à la fois pour dessaler le bateau et pour évacuer un peu de la m… des fous.
J’ai passé une heure à nettoyer le foc en début d’après-midi et encore je n’ai fait que le plus gros. Il va me falloir de bonnes grosses pluies pour revenir à l’état normal. C’est fou (!!!) ce que ça produit. Pas étonnant qu’il y ait eu des montagnes de guano sur certaines îles. Bon vous l’avez compris, il sont toujours là tous les cinq : trois pieds rouges, deux marrons. Parti comme c’est ils vont créer une nouvelle colonie aux Marquises (je ne sais pas s’il y en a là bas). Je vais être accusé d’importation illégale. En tout cas ils ne sont vraiment pas farouches. Quand je nettoyais leurs déjections j’étais à 50 cm du plus proche qui ne bronchait pas. Il me regardait avec intérêt.
Le vent est très variable en force. Je l’ai déjà dit. Alors comme je ne vais pas changer la voilure tous les quarts d’heure (10 fois quand même depuis ce matin) je suis souvent sous-voilé. La moyenne du jour s’en ressentira.
PS : j’ai de plus en plus de mal à accrocher Panama par HF. Il n’y a plus qu’un créneau dans l’après midi où ça passe. Les autres stations sont encore très loin.
11 juin.
18 juin.
Merci à tous ceux qui m’ont souhaité ma fête. La fête des pères m’était complètement sortie de l’esprit.
Et de fait cela a bien été ma fête la nuit dernière. Cela a commencé par un bon grain bien sévère avec rafales jusqu’à 36 nds (F8). Sous GV seule à un ris on dépassait les 8 nds. On était bien chahuté mais ça allait. Vers 3 h du matin cela s’est bien calmé. Je renvoie le génois tangonné et retourne me coucher. A 04h35 petit tour sur le pont et ô surprise je vois le génois complètement dans l’eau en train de chaluter. Aucun bruit, aucun choc. De nuit, 2.5/3m de creux, une pluie qui n’était pas du crachin breton, il m’a fallu une heure et demie pour récupérer la bête et tout ranger.
C’est la manille du point de drisse qui a lâché. Je pense que c’est le fort roulis dû à la mer confuse que l’on a depuis plusieurs jours qui faisait beaucoup travailler le génois qui doit en être la cause. Après examen les dégâts sont minimes juste 30cm de ralingue déchirée en tête de génois. Un voilier sera le bienvenu, je ne sais pas si ça existe par ici. Mais je pourrai faire une réparation de fortune.
Comme je vous le disais ça a été ma fête. Cela gâche un peu le plaisir d’arriver. Demain matin. Je vais me mettre à la cape une partie de la nuit pour attendre le jour et arriver en début de matinée.
Et le plus improbable : je retombe en début d’après-midi sur “Appel d’air” un voilier français parti le même jour que nous des Las Perlas sans le savoir. On est déjà tombé nez à nez au milieu de nulle part il y a dix jours. Probabilité quasi nulle. On recommence aujourd’hui. Bon, il est vrai qu’on est plus près de terre et qu’on va au même endroit. Eh bien il leur est arrivé exactement la même mésaventure hier après-midi. Ils ont une machine à coudre à bord, je sens que nous allons organiser des ateliers voilerie à Fatu Hiva.
Moralité : tant qu’on n’est pas arrivé, tout peut arriver…
Encore merci à tous.
(Photo Appel d’Air).