Nous voilà repartis vers de nouvelles aventures et lieux à explorer.

Mais comme il est préférable de ne pas naviguer de nuit (beaucoup d’engins de pêche non éclairés) nous n’avons pas beaucoup d’options, seulement deux mouillages s’offrent à nous. Premier soir une baie où nous arrivons en fin d’après midi sous une pluie battante, Kampung Ambon, pour 2 nuits. 200litres d’eau récupérés dans nos tanks.

Au matin nous admirons le paysage autour de nous, une étendue d’eau calme, très peu de fond et très peu de passage de pêcheurs. Baie dominée par le mont Kinabalu (4095m).

Obstacles sur la route.

Pour le déjeuner nous aurions bien aimé mouiller à Pulau Mantanani, dont les fonds sont réputés mais on ne fait pas toujours ce que l’on veut, trop de vagues, mouillage délicat, on ne peut y rester.

Donc nous arrivons en fin d’après-midi à Pulau Kulambok. Alors là nous avions le choix, côté nord ou côté sud ? On choisit le sud…Mauvaise pioche, en début de nuit le vent change de direction et nous sommes chahutés pendant quelques heures.

Pour le petit déjeuner, nous passons « The Tip of Borneo », nous sommes au plus nord de l’île de Bornéo.

Temps magnifique, puis direction Kudat l’escale envisagée.

Cap au Sud- Sud-Est pour entrer dans Teluk Marudu,  la grande baie de Kudat. Nous avons changé de mer, nous sommes en mer de Sulu. Notre décision n’est pas encore prise, irons-nous mouiller au Duck Pond ou devant la ville ? Un petit tour au Duck Pond rien que pour voir… mais nous sommes tout de suite invités à poser notre ancre par des voiliers allemands, dont un, Odin, que nous connaissons déjà depuis Pulau Gaya. En fait nous récupérons un mouillage prévu à cet effet et amenons deux aussières à l’arrière sur les rochers et les arbres du golf.

Le bassin est très animé : un chantier de bateaux de travail, un ponton pour l’armée, un ponton pour les visiteurs et les barcasses, un restaurant en hauteur. L’hôtel pour les golfeurs se trouve un peu à l’écart. En fait le Golf très fréquenté est immense, 18 trous, et vient protéger le bassin de la marina, les aficionados se baladent en voiturettes électriques.

Bon nous sommes samedi et nous attendrons lundi pour faire notre déclaration d’arrivée. Ce qui ne nous empêche pas d’aller faire un tour en ville en fin d’après-midi. Ici pas de Grab, les Uber s’appellent Maxim !

Voici une petite ville authentique,90 000 habitants, un port devrais-je dire. Les bateaux de pêche y sont nombreux, nous nous promettons des orgies de crevettes. De petits magasins-échoppes, une papeterie où je trouve du papier calque pour la couture, une supérette pour le pain de mie. Certaines maisons près du port sont encore en bois et on imagine bien la vie à l’époque, la main- d’œuvre chinoise à l’affut de petits boulots. La ville elle-même est agréable et propre, on s’y repère facilement, les rues sont larges et assez boisées. Pas de constructions en hauteur excepté deux hôtels sans charme aucun. Un temple, deux mosquées, une église, des écoles et des administrations. Plusieurs marchés dont celui aux poissons et deux petits supermarchés, malheureusement difficile de trouver un rayon non halal.

Avant de quitter Kudat, Eric décide de retirer de l’argent. Mais ce jour là tous les habitants sont devant les distributeurs. Prime de fin d’année pour certains. 300MYR (60€) pour une personne seule et 600 pour un couple.

La région de Kudat est celle de la tribu des Rungus qui étaient installés tout autour de la baie. Bien que très isolés du reste de Bornéo, les Rungus commerçaient avec les bateaux de Brunei qui venaient échanger des gongs, des métaux, des porcelaines chinoise, des tissus contre du riz et du maïs. Chaque famille, famille au sens élargi, vivait dans une « longhouse », ossature en bois ou en bambou, murs et toits en écorce ou palmes, toujours construite sur pilotis. Une galerie protégée par l’avancée de toit permettait aux hommes de monter la garde ou de dormir « à la fraîche », les femmes étaient toujours à l’intérieur. Les Rungus se sont convertis petit à petit au Christianisme et à l’Islam. Mais l’attrait de la modernité leur a fait changer de mode de vie. Les femmes sont toujours réputées pour leur habileté dans le tissage, la confection de balais à partir de palmier, le tressage de paniers et de colliers de perles. Ce peuple a maintenu sa culture traditionnelle et surtout l’a transmise aux jeunes générations.

Kudat était très isolée jusqu’en 1960, date de la construction de la route KK-Kudat. Seuls les transports par bateaux la reliaient aux régions plus sud. Seules ressources de la ville les noix de coco et les produits de la mer.

En 1752 les Anglais s’intéressèrent à la région Nord Bornéo puis les Américains. Le pétrole découvert mi XIXème siècle aurait dû aider au développement de la ville mais le manque d’eau a fait émigrer la compagnie britannique vers Sandakan plus au sud. Les Anglais de la British North Borneo Chartered Company ayant besoin de main d’œuvre firent appel à des Chinois, pour la plupart de Hong Kong, qui se révélèrent être commerçants et non agriculteurs. Ce furent des Hakkas Chrétiens qui furent ensuite amenés sur le territoire. De 1883 à 1889 plusieurs groupes s’installèrent autour de Kudat constituant par là même la plus ancienne communauté de Hakkas dans l’Etat de Sabah. La compagnie offrait terrains et outils, plus nourriture pour 6 mois. Il leur fallait défricher, remuer la terre, planter leurs 4Ha en riz et autres cultures. Ils participèrent à la fondation de l’école Saint Peter en 1890 mais ils préféraient leurs écoles informelles dont l’enseignement était toujours en chinois.

Ce sont eux qui transformèrent le paysage en plantant des cocotiers, (actuellement 5700 hectares autour de Kudat et sur l’ile de Banggi). Il y eut aussi des plantations du caoutchouc remplacées petit à petit par celles du palmier à huile.

Pendant la deuxième guerre mondiale, l’armée impériale japonaise construisit un aéroport avec l’aide forcée des locaux et de prisonniers javanais et indonésiens. Beaucoup moururent de malnutrition et de mauvais traitements. Piste construite à base de pierres de corail, bombardée par les B25 américains en 1945. L’aéroport est toujours là mais ne fonctionne plus depuis quelques années.

La ville de Kudat et la région se développèrent grâce à la construction de la route les reliant enfin à Kota Kinabalu. Actuellement la majorité des magasins sont la propriété de Hakkas. Beaucoup de noms de rues ont leur origine dans le langage Hakka ou font référence à des membres connus de la communauté.

Merci Anne pour le document sur Kudat.

 

Au bout de 5 jours nous décidons d’appareiller direction le Sud-Sud-Est, Sandakan sera notre point le plus sud sur cette côte. Nous commençons par une escale dans l’ile de Banggi au nord Est pour une nuit. Joli abri, le chenal d’entrée est profond (17M) contrairement à ce qui est indiqué sur les cartes.

Là aussi nous sommes tenus de ne naviguer que de jour. C’est la région où le groupe Abu Sayyaf s’était manifesté et avait en particulier pris en otage des équipages de voiliers.  Même si aucun incident n’est à déplorer depuis plus de 10 ans, la région reste très surveillée par l’Esscom (Eastern Sabah Command) à qui nous rendons compte de nos mouvements tous les jours.

2 longues journées au moteur, un peu maussades, temps gris ou pluie mais une nuit bien protégée devant le village de Jambongan. Et encore 100 litres d’eau récupérés grâce à nos tuyaux branchés sur le bimini et arrimés aux nables des caisses à eau.

Arrivés à Sandakan en toute fin d’après-midi entre chien et loup, nous laissons la falaise à tribord, nous apercevons à droite le village sur pilotis, la grande mosquée, deux cargos mouillés dans la baie puis en face de nous les lumières du grand centre commercial, projet de 2003. On s’arrête avant et on mouille devant le yacht-club tout éclairé.

Notre mouillage se révèle très passant. Pour traverser la baie les communications se font par voie de mer, beaucoup de taxis boats pour la rive d’en face ou pour le village sur pilotis de Sim Sim.

C’est sympa mais quelquefois un peu trop agité.

Pour accéder au ponton du « yacht-club », il faut souvent escalader les parties verticales avant d’arriver sur les planches quelquefois manquantes ou pourries de la passerelle horizontale.

Ici pas besoin de Grab ou de Maxim, nous pouvons tout faire à pied. Tout de suite la ville nous plaît par son côté actif. Et pourtant les immeubles ne sont pas beaux, ils sont noirs d’humidité, les fenêtres sont grillagées, du linge y est suspendu. On part à la découverte, toujours des petits magasins, de mécanique, d’accastillage, de nourriture, des petits restaurants pour la plupart halal, deux boulangeries pâtisseries, mêmes gâteaux que partout colorés et surchargés de figurines, une mercerie où je reviens le lendemain avec mon ouvrage pour compléter perles et strass. Eric pendant ce temps va chez le coiffeur, moi je ne trouve personne pour me coiffer. Nous n’avons pas envie de tout voir le même jour et gardons le marché et la visite historique de la ville pour plus tard.

Donc retour à bord et piscine pour moi !

Les marchés sont très animés surtout le matin, tous couverts, celui aux fruits et légumes est assez sombre et les passages étroits entre les étals. Le marché aux poissons et aux poulets est plus lumineux et on y circule mieux. Les pêcheurs déchargent derrière et les poissons arrivent directement sur les étals.

Agnès Keith, est une célébrité locale pour les romans où elle décrivait la vie à Sabah. La visite de sa superbe maison est très enrichissante. Bien sûr nous ne sommes pas dans l’originale, c’est une reconstruction mais à l’identique. Sur pilotis de bois, planchers foncés, murs clairs, pièces vastes et hauts plafonds pour faciliter la ventilation. Dominant la baie, un peu à l’écart de la ville mais facile d’accès à pied surtout pour redescendre. Là, il est très facile d’imaginer la vie d’avant et après la 2de guerre mondiale. Pour mieux comprendre la vie à Sandakan et North Borneo, lire ses romans « Land below the wind », « Three came home » …

Comme à Penang, les fresques retracent la vie des anciens.

Un petit tour au village sur pilotis « Sim Sim village » pour déguster du poisson et prendre quelques photos de l’habitat. La marée est basse, les pêcheurs rentrent à pied en trainant leurs petits canots.

Le soir, le ciel se charge souvent de nuages accompagnés de pluie et d’orages. La pluie permet de remplir nos caisses à eau mais nous craignons les orages.

Sandakan, capitale de l’État de Sabah sous protectorat britannique de 1883 à 1946. Dans les années 30, la ville était le premier exportateur de bois exotique. Elle fut entièrement détruite après l’occupation japonaise (1942 à 1945). Et reconstruite sans charme aucun.

Les Marches de la Mort, marches forcées ayant pour but de faire mourir d’épuisement les prisonniers ou déportés. 260km entre Sandakan et Ranau dans la jungle, 3600 cultivateurs indonésiens et 2400 prisonniers de guerre alliés. Cet événement est considéré par les Australiens comme la pire atrocité qu’ait pu vivre une armée captive.

Seuls 6 survécurent, ils s’étaient évadés de la colonne et s’étaient cachés dans la jungle.  Ils auraient été nourris par quelques villageois.

Sandakan est le deuxième port après KotaKinabalu pour  l’huile de palme, le tabac, le café, le chanvre de Manille et le sagou.

En 2003 a été décidé un renouvellement urbain pour remodeler le centre-ville. Un marché central, un marché aux poissons, un centre commercial et des hôtels. La ville est connue pour sa fonction touristique car c’est le point de départ d’excursions sur la rivière Kinabatangan et de visites de plusieurs réserves pour animaux : Sun Bears, éléphants, Sepilok Orang Outan et tortues sur quelques îles. (Wikipédia).

La ville continue de subir des coupures d’eau et d’électricité surtout après de gros orages.

 

 

Retour à Kudat par le chemin des écoliers. De petites étapes nous mènent d’îles en îles et nous sommes chanceux avec la météo car nos mouillages ne sont pas très abrités.

Nous visons l’île de Tegipil et y arrivons en tout début d’après-midi. Mais 1 heure plus tard, 5 jeunes militaires sur la plage nous hèlent. Plus qu’à descendre l’annexe et aller vers eux. Interdiction de mouiller ici, nous sommes en zone militaire. Eric essaie de les amadouer, leur supérieur arrive mais personne ne flanche. Bon le règlement c’est le règlement. Ok, nous avions bien aperçu le radar mais n’avions pas imaginé que la zone était interdite pour autant. Il nous faut trouver un mouillage rapidement car la nuit tombe vite ici.

Ce sera à 3 nautiques de là près des pêcheurs.  Au matin, 3 d’entre eux viennent nous proposer du poisson ou une petite langouste, 100 MYR la langouste ! Non ce sera 50 (10€). Ils lorgnent nos masques, demandent à manger. Refus de notre part. Les 200gr de langouste seront dégustés le soir même.

Retour à Banggi puis Kudat entre deux grains, déception notre joli abri le Duck Pond est envahi de déchets, c’est désolant.

Bonne nouvelle, l’annexe est enfin arrivée, reste à ouvrir la grosse caisse et gonfler le nouveau joujou.

Nous retrouvons Winnie et Michel de KK qui ne veulent pas nous laisser finir l’année en Malaisie tout seuls. Dîner à bord pour le 31 décembre et le 1er janvier un tour au marché où Winnie nous explique les herbes et les légumes, déjeuner dans un restaurant sympa sur pilotis, couture pour Winnie et moi l’après-midi et piscine dans leur hôtel. Le soir le petit restaurant de la marina. Winnie et Michel partent le lendemain à la recherche de la Rafflesia dans la jungle de Poring Hot Springs.

 

 

(Photos Michel “Gaston”)

7h30 le lendemain, 2 janvier, Manevai est sorti de l’eau et le travail commence. Nettoyage de la coque au karcher, du pont, des coffres avant, changement de l’anode, changement du PSS (presse étoupe) et surtout resserrage des boulons silent-blocks et autres. Malheureusement toujours dans la poussière du ponçage de coque d’un catamaran. Passage obligé dans les différentes administrations pour la sortie du pays. Et réglage des fixations de l’annexe.

Remise à l’eau le 3 janvier à 14h, nous passons dire au revoir à Odin et au catamaran qui a acheté notre ancienne annexe et nous faisons route au nord. Un dernier stop pour la nuit devant le village de Karakit à Banggi et appareillage à 7 h pour les Philippines.

Nous vous souhaitons une année 2025 aussi douce que possible.

A bientôt à Puerto Princesa, port d’entrée aux Philippines.

www.manevai.fr

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